vendredi 30 novembre 2007

Chère Maman,

Il est des choses dont j'ai envie de te parler depuis longtemps, mais je n'ai jamais pu te les dire. Quand je suis devant toi, les mots ne sortent pas car je sais que même s'ils sortaient, tu ne les entendrais pas, tu ne voudrais pas les entendre et même si tu le voulais, j'ai bien peur que tu ne le puisses pas.
Tu es assez catégorique, autoritaire, tyrannique. Tu ne te remets jamais en question. Et la seule fois où j'ai tenté d'aborder le sujet avec toi, il y a 2 ans et demi, je me suis heurtée à un mur. Je me suis heurtée à un monstre d'égoïsme qui a réussi à me culpabiliser encore plus, qui ne m'a pas écoutée, qui ne m'a pas entendue.
Tu sais que tu as des torts mais ils sont trop durs à regarder en face et assumer. C'est tellement plus simple de dire que tout est de ma faute. Ou de la faute de mon mari. Le coupable idéal.
Mais il n'en est rien, maman.
Depuis des années, je suis en psychothérapie et depuis des années, je ne parviens pas à m'en sortir.
Mon psy m'a maintes fois conseillé d'en parler avec toi, calmement, trouver le moment opportun, mais ce n'est jamais le bon moment. Tu ne pourras jamais admettre que tu aies pu te tromper et faire les mauvais choix, tu ne pourras jamais supporter cette responsabilité, celle que si je rate ma vie maintenant, c'est en grande partie à cause de toi.
ça me fait mal de te dire ça, vraiment, mais c'est pourtant la stricte vérité.
Une mère est là pour élever son enfant, l'élever dans tous les sens du terme. Toi, tu n'as fait que m'enfoncer, me rabaisser. Avais-tu peur que je devienne plus grande que toi ?
Je le suis devenue, maman. Je suis plus grande que toi. J'ai du mal à avoir confiance en moi et être fière de mon parcours et ce, malgré le fait que je me sois relevée du pire, que je m'en sois sortie, j'ai vraiment du mal à me sentir grande. Pourtant, je crois que je le suis.
Je crois que je vaux plus que ce que tu penses de moi, je crois que je suis mieux que ça, je crois que je suis plus forte que tu crois, mais tu mets tout en oeuvre pour que je ne parvienne pas à m'en persuader vraiment. Et les rares fois où j'y arrive, tu me remets rapidement au tapis.
Aujourd'hui, je suis fatiguée, maman. Fatiguée de toujours m'en vouloir, fatiguée de toujours culpabiliser, fatiguée de me sentir mal, fatiguée de ne pas m'aimer et m'accepter, fatiguée de subir tes sarcasmes incessants.
Je sais que tu m'aimes, je t'assure, mais tu le montres mal. Très mal.
Tu ne sais pas comment faire et pour ça, je ne t'en veux pas. Mais il est temps pour moi de remettre les choses à leur place : je ne suis pas responsable de tout. La vraie coupable, pour beaucoup de choses, c'est toi.