mardi 21 octobre 2008

Happy (birth)day

Aujourd'hui, c'est son anniversaire, il aurait eu 58 ans.
Aujourd'hui, c'est son anniversaire et il est mort depuis 65 jours.
Toi, maman, tu pleures. Tu te sens mal, il te manque. Mais malgré ça, tu continues d'avancer. Tu te bats contre son fils pour honorer la mémoire de son père, le testament n'est pas en sa faveur et ça l'énerve, il te cherche des problèmes, te menace alors que tu seras la seule à avoir soutenu son père toute sa vie. Ce soir, en sa mémoire, tu t'es laissée invitée au restaurant grec par ta meilleure amie. Parce que cet été, s'il n'avait pas été malade, vous auriez dû partir en vacances en Grèce. Petit clin d'oeil. Que je ne comprends pas trop mais c'est ton choix. Je ne pourrais pas aller au restaurant le jour de l'anniversaire de mon amour s'il était mort ...

Aujourd'hui, c'est son anniversaire, il aurait eu 58 ans.
Il est mort depuis 65 jours et depuis sa mort, j'ai retrouvé ma mère. Je sais enfin ce que c'est d'en avoir une.
Tu me poses des questions sur moi, sur ma vie, tu t'y intéresses, tu essaies de m'aider dès que tu sais que ça ne va pas très bien pour certaines choses, tu recommences à venir chez moi régulièrement, ce que tu ne faisais plus depuis 3 ans.
Tu fais des projets : te chercher un appartement dès que la maison sera vendue, avoir un perroquet comme animal de compagnie, partir l'année prochaine en vacances. En Grèce, comme il aurait voulu. Tu parles de prendre des cours de diction, tu adorais ça quand tu étais ado ! T'acheter un ordinateur et surfer sur internet alors que tu n'as jamais touché un clavier de toute ta vie.
Je suis heureuse de voir que tu ne sombres pas malgré la douleur de l'avoir perdu.

Aujourd'hui, c'est son anniversaire, il aurait eu 58 ans.
65 jours qu'il est mort et moi, je vais bien. Tout ne roule pas toujours très bien dans ma vie, j'ai quelques petits soucis, comme tout le monde, mais rien de bien grave. Le pire sont mes problèmes relationnels avec les gens, des problèmes au niveau sentimental aussi. Mon incapacité à me lier vraiment aux autres, mon habitude à toujours rester sur la défensive, à ne pas faire confiance. Mon incapacité à gérer une relation depuis plus de deux ans, et encore moins à tourner la page. Et mon incapacité à aimer une des rares personnes qui ne me fait que du bien depuis que je l'ai rencontré, comme si je ne croyais pas qu'il puisse être vraiment gentil et correct avec moi, comme si je n'avais pas droit au bonheur. Je m'interdis en fait d'être heureuse, par peur de voir ce bonheur brisé.

Aujourd'hui, c'est son anniversaire, il aurait eu 58 ans.
65 jours qu'il est mort et ... je suis heureuse qu'il le soit.

mercredi 1 octobre 2008

On n'oublie jamais rien, on vit avec

45 jours qu'il est décédé.
45 jours que mon cauchemard est terminé. Enfin, presque.
Parce que oui, le souvenir de ces moments horribles reste à jamais gravé en moi.
Je me souviens l'odeur de ton sang, maman, quand il te battait et te laissait pour morte à même le sol. Je me souviens de l'odeur de la bière et de la cigarette, mélange nauséeux qu'il a fallu supporter pendant si longtemps. Je me souviens du bruit de ta tête heurtant le bord de la baignoire, les coups successifs et incessants. Je me souviens de tes cris me réveillant la nuit.
Et je me réveille encore en sursaut, en sueur, 15 ans plus tard.
Mais les choses ont changé. Il n'est plus là.
Il faut maintenant s'habituer à son absence et à la liberté retrouvée. C'est dingue comme je vois les choses autrement, comme nos vies ont déjà changé en si peu de temps. Au delà de ta tristesse, je te vois doucement revivre, reprendre goût aux choses simples, celles que tu avais oubliées.
Depuis le jour de sa mort, tu t'intéresses à moi, à ma vie professionnelle, à mes amours. Je ne savais pas ce que c'était d'avoir une mère, maintenant je sais.
Je n'en ai pas l'habitude et j'ai du mal à me dire que tout va bien entre nous. Je m'attends sans cesse à la remarque qui tue, au coup de poignard dans le dos, mais rien ne vient. Tu es là, tu souris, je te sens comme libérée. Et je le suis aussi, même si beaucoup de choses restent en suspens. J'ai essayé d'aborder certains sujets avec toi mais revenir sur le passé t'est inadmissible. C'est fini, il est mort, on n'en parle plus. C'est si facile... et si dur en même temps car la souffrance a été là, et elle l'est toujours. Mais d'un autre côté, je me dis que tu as raison : regarder en avant, avancer, vivre l'instant présent, faire des projets pour le futur ... essayer d'oublier et pardonner ?