samedi 23 août 2008

Amen

Les obsèques ont eu lieu hier.
Il est parti en fumée, réduit en cendres.
Il voulait se faire incinérer, il ne reste plus de lui qu'une urne dans un cimetière. Et des souvenirs plein la tête.

J'ai pleuré de soulagement dimanche quand j'ai appris sa mort. Un de mes pires cauchemars se terminait enfin.
Il m'a gâché la vie pendant 27 ans, me traitant de folle à enfermer à l'asile, battant ma mère, ne cessant de prendre les gens pour des moins-que-rien, rabaissant sans cesse les autres par son comportement méprisant, violent et agressif.
L'odeur de bière a disparu de la maison, l'odeur de cigarette également. On peut enfin y respirer un air sain et ça fait du bien.
La maison semble vide, calme. Et ça aussi, on avait oublié ce que c'était.

Cette semaine fût très difficile car les gens ne sont pas au courant de la situation, ils ne l'ont jamais été.
Pendant des années, nous avons tous joué un rôle, celui de la parfaite petite famille sans histoires.
Dire qu'on se détestait, que notre quotidien était fait de son alcoolisme et de son agressivité, de ses coups, de ses insultes, ça paraîtrait incroyable aux yeux des gens. Ils le savaient sale caractère et souvent de mauvaise humeur, mais pas au point de battre sa femme et semer la terreur au sein de sa propre famille.
Et pourtant...

Toi, maman, tu vas très mal.
Car malgré tout ce mal, tu l'aimais. Il a été ton homme pendant 27 ans, il est difficile de passer outre, de faire comme si ça ne comptait pas.
Depuis une semaine, tu n'as presque pas dormi ni mangé et lors des funérailles hier, j'ai bien senti que tu étais prête à t'effondrer.

Pour ma part, je vais bien, mais jouer les hypocrites devant les gens a été très pénible pour moi. J'avais envie de leur dire la vérité, tout le mal que je pensais du défunt, leur dire que j'étais soulagée qu'il ne soit plus de ce monde, mais par respect pour toi, je n'ai rien dit, j'ai fermé ma gueule une dernière fois. J'ai tenu bon.

Je n'ai plus versé une seule larme et j'ai entendu quelques personnes se demander pourquoi je n'avais aucune réaction face à ce décès, pourquoi je ne pleurais pas l'homme qui s'était comporté comme un père avec moi.
Une fois de plus, je serai la fille sans coeur, la fille indigne, la méchante, mais je m'en fous. S'ils savaient...

Un autre n'a affiché aucune réaction : son propre fils.
Il a bien sûr fait un scandale à un certain moment, car il voulait montrer qu'il était là, mais il se fiche de son père, seul l'héritage l'intéresse et il l'a déjà montré : son père n'était même pas encore froid qu'il allait déjà chez le notaire pour tenter d'avoir une copie du testament !
Même moi qui n'aimait pas son père, je n'aurais jamais pu me comporter ainsi et manquer de respect à ce point. La moindre des choses aurait été d'attendre que les funérailles soient terminées et que le notaire fasse l'ouverture du testament en temps et en heures...

Les histoires de famille commencent déjà, alors qu'il n'était même pas encore inhumé...
Moi, je m'en fiche, je ne m'en mêle pas, mais je sais que toi, tu en verras des vertes et des pas mûres avec son fils.

Pour moi, c'est juste une nouvelle vie qui commence. Sans lui.
Les choses ont déjà un peu changé : cette semaine, nous préparions les funérailles et j'ai pu observer qu'on avait plus de facilités à communiquer, un vrai miracle.
Je ne sais pas si ça durera, mais qui sait...
Je ne suis pas prête à te pardonner, je n'oublierai jamais certaines choses, et j'ai encore tendance à ne pas vraiment vouloir de toi dans ma vie, mais tu restes la mamy de ma fille et si on peut avoir des relations plus calmes et arrêter de se prendre la tête, ça sera déjà ça de gagné.

Wait & See...

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